Guide du Pérou

Ecosystèmes du Pérou
et problèmes environnementaux :
la côte Pacifique et les contreforts andins (1/3)

Le Pérou dispose d’une extraordinaire variété d’écosystèmes et compte parmi les pays les plus riches de la planète pour sa biodiversité. En ce qui concerne la flore, on estime que le pays abrite environ 25 000 espèces (10 % du total mondial), dont 30 % sont endémiques, c’est-à-dire propres à ce territoire. La famille de plantes la plus représentée est celle des orchidées, riche de quelque 3 000 espèces. Côté faune, le Pérou s’enorgueillit d’héberger 462 espèces de mammifères, 1 815 d’oiseaux, 395 de reptiles, 408 d’amphibiens, 2 000 de poissons et 4 000 de papillons. La plus grande part de ce patrimoine écologique sans égal se trouve dans la partie amazonienne du Pérou, qui occupe 61% du territoire national : malheureusement, cet écosystème fragile est aujourd'hui très menacé...


Coupe schématique du Pérou (10° de latitude environ) avec ses "étages" écologiques (D. Duguay)

La côte (chala)
Telle qu'on peut la découvrir tout au long de la route Panaméricaine, la longue plaine côtière du Pacifique, dénommée chala en quechua, aride et sablonneuse, est parsemée par endroits d’une rare et maigre végétation de plantes sclérophylles, d'arbustes, d'euphorbes et de cactus, notamment de belles variétés de cactus candélabres. Cette végétation s’adapte dans le désert pour résister à la sécheresse; certaines plantes fleurissent uniquement durant la nuit et captent l’eau du brouillard. Au sud, elle disparaît presque complètement dans les pampas minérales et les cordons de dunes qui s'étendent entre Arequipa et Tacna, annonciatrices du grand désert d'Atacama.
Le contraste est saisissant avec le tapis de verdure que l'on découvre dans les oasis fluviales, bien irriguées : bosquets de palmiers, d'eucalyptus et de caroubiers délimitent les plantations de maïs, de céréales, les rizières, les bananeraies et les champs de canne à sucre, anciens domaines des grands propriéaires terriens, les latifunderos qui constituèrent, à partir de l'Indépendance, la classe dirigeante du Pérou.

Grâce au courant de Humboldt, les eaux du Pacifique péruvien abondent en anchois et autres espèces marines (espadons, sardines, églefins, soles, maquereaux, éperlans, flétans, homards, poulpes et calamars). Cette richesse des espèces marines fit du pays un des leaders mondiaux de la pêche dans les années 1970-1990, avant que la ressource ne se raréfie par surexploitation, comme partout ailleurs.


Les oiseaux de la Punta San Juan - Colonie d'otaries dans les îles Ballestas (photo Rumbos)

Les 2600 km de rivage péruvien, formé d'immenses plages et de falaises rocheuses, ne laissent que peu de place aux cordons lagunaires et aux marais humides : les rares zones d'exception sont, en allant du nord au sud, les mangroves de Puerto Pizarro, proches de la frontière équatorienne, avec leur végétation semi-aquatique de palétuviers aux racines sortant de l'eau, l'albufera (ou lagune) de Medio Mundo entre Trujillo et Lima, les pantanos (ou marais) de Villa à la sortie sud de Lima et enfin les lagunes de Mejia au sud d'Arequipa, où lon rencontre un nombre et une variété impressionnante d'oiseaux migrateurs venus des cordillères, ainsi que de très grandes colonies de flamands roses. Les milieux plus typiquements marins et essentiellement rocheux des îles Guanape, Palomino (qui font face à Lima), Ballestas (les fameuses îles à guano), la péninsule de Paracas et plus loin la Punta San Juan, au sud de Nazca, sont le domaine des oiseaux de mer (mouettes, albatros, sternes, fous, pélicans) et des mamifères marins qui viennent s'y reproduire en grand nombre. Toutes ces zones sont heureusement protégées.

Au domaine côtier se rattachent encore les Lomas de Lachay, 100 km au nord de Lima, petit massif de collines recouvertes d'une végétation permanente, grâce à la condensation des nublosités venues du Pacifique : la cime des arbres capte l'eau et la redistribue vers le sol, générant un beau tapis végétal vert sombre. Certains spécialistes avancent que ce type de "forêt maritime" formait jadis une frange continue qui ourlait la côte nord du Pérou, avant de disparaître sous les effets conjugués de la déforestation humaine et d'un long réchauffement climatique. On a noté que ce type de végétation s'était reconstitué par endroits, mais de façon éphémère, lors des épisodes extrêmement pluvieux (phénomène rarissime sur la côte) du Niño survenus en 1982, 1983 et 1998. Le long de la très désertique Panaméricaine Sud, entre Nazca et Arequipa, les belles Lomas de Atiquipa relèvent du même écosystème, mais ici plus dépendant de l'humidité apportée par l'hiver austral.

Tout au nord, près de Tumbes, on trouve l'un des rares exemples péruviens de l'écosystème dit "forêt sèche équatoriale" recouvrant les cerros de Amotape, petite chaîne côtière dont le point culminant est le Cerro del Barco (1663 m), en partie couverte d'une forêt sèche constituée d'essences peu communes sur la côte péruvienne (dont le spectaculaire fromager, ou ceibo, au tronc gris et lisse comme une colonne, qui peut atteindre 25 m de hauteur) et où l'on trouve une faune extrêmement riche (gibier, oiseaux - parmi lesquels des condors - amphibiens et reptiles) qui a été préservée grâce à son statut de Parc National couvrant une superficie de plus de 90 000 ha. Un autre massif du même type se trouve plus au sud, dans la région de Chiclayo, le bosque de Pomac qui présente sur une étendue de 6000 ha une exceptionelle densité de caroubiers (algarrobos) et de zapotes. Ce serait la forêt la plus ancienne de la côte du Pérou.


Paysage de forêt sèche équatoriale : les cerros de Amotape

Contreforts andins du Pacifique
A l'intérieur des terres, la frange de plateaux, de contreforts andins entaillés par les moyennes et hautes vallées qui dévalent vers le Pacifique forment deux étages écologiques distincts : la zone dite des Yungas (entre 1000 et 2000 m d'alt.) et la zone dite Quechua (entre 2000 et 3500 m d'alt.). Les géographes péruviens englobent ces deux zones sous le terme de serrania esteparia, difficilement traduisible en français par "steppe de montagne" tant ses paysages sont accidentés et parfois très différents du nord au sud, mais leur aspect commun reste celui de pentes sèches et dénudées qui n'est en rien comparable, comme on le verra, avec la physionomie des deux mêmes étages du versant amazonien des Andes. La partie basse, les Yungas (ou vallées chaudes) ne bénéficie que de rares précipitations pendant l'hiver austral. Par manque d'humidité, la faune et la flore y restent limités, sauf dans les vallées où les rivières ont un débit suffisant pour pratiquer un peu d'agriculture intensive sur des surfaces importantes (coton, fruits et agrumes notamment). On peut y trouver parfois quelques bosquets d'eucalyptus et des forêts de cactées ou de broméliacées, où des oiseaux de proie descendus des cerros voisins viennent chasser les rongeurs les lézards. L'étage Quechua reçoit des précipitations plus abondantes et son climat est plus tempéré (entre 6° et 12° de moyenne hivernale). Les villages suspendus sur ces contreforts - d'allure assez pauvre et reliés à la côte par de mauvaises routes - vivent de cultures presque uniquement vivrières, distribuées en petits lopins. On y trouve aussi quelques massifs forestiers, plus riches en faune et en flore que ceux des Yungas. L'un des plus intéressants est le bosque de Zarate dans la vallée du rio Rimac. Mais hélas comme dans beaucoup d'autres massifs forestiers du piémont andin, des espèces natives, jadis abondantes, comme le cerf, le puma et l'ours à lunettes ont quasiment disparus depuis une vingtaine d'années.

A la zone dite Quechua on peut assimiler dans le sud du Pérou la campiña de Arequipa, vaste plaine fertile arrosée par le rio Chili, enclavée entre des déserts côtiers extrêmement arides et les grands massifs volcaniques qui entourent Arequipa, la "ville blanche". Cette sorte de grande limagne péruvienne est à l'origine de la prospérité agricole de la seconde ville du pays, mais son intégrité est de plus en plus menacée par l'extension urbaine. Enfin, bien qu'enclavées entre les hauteurs de la Sierra, les vallées de la Cordillère centrale (situées au dessous de 3000 m) depuis le Callejón de Huaylas au nord, la vallée du rio Mantaro, les régions d'Ayacucho et d'Andahuaylas, la vallée du rio Urubamba et du rio Vilcanota autour de Cuzco, présentent les mêmes genres de paysages façonnés par l'homme depuis des millénaires et d'ailleurs un même type de société rurale commun à l'étage quechua, terme qui bien au-delà de son sens d'écosytème ou d'étage écologique est aussi sinonyme de peuple, de culture et de langue.


Autres pages :
Écosystèmes et problèmes environnementaux :
Les Andes (2/3)
L'Amazonie (3/3)


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