Guide du Pérou

La rive sud du lac Titicaca


La Cordillera Real et la Isla del Sol, vues depuis la presqu'île de Copacabana

La découverte de ce merveilleux itinéraire fut longtemps pénalisé par une route épouvantable, parfois impraticable à la saison des pluies. Désormais asphaltée depuis Puno jusqu'à Desaguadero (frontière bolivienne), elle offre aujourd'hui une voie royale, parsemée de petits joyaux d'art colonial et surtout de vues somptueuses et inoubliables sur le lac Titicaca, bordé au loin, par la frise étincelante de la Cordillera Real. Au delà de Desaguadero, elle se poursuit en territoire bolivien jusqu'au site de Tiahuanaco, et plus loin, vers La Paz.
De nombreuses agences de tourisme de Puno proposent cette excursion, avec des variantes conduisant à Copacabana, d'où l'on peut embarquer vers les îles du Soleil et de la Lune.


Chucuito
10 000 hab. - alt. 3890 m - Puno : 18 km
Construite sur une hauteur dominant la rive sud du lac Titicaca, Chucuito est la première localité importante traversée après Puno : on y jouit d'une vue splendide sur le lac, les îles d'Amantani et de Taquile. Le bourg possède l'une des plus anciennes églises coloniales de l'altiplano, l'église Santo Domingo, bâtie en 1537, dont l'atrium est accessible par un arc de pierre précédé d'une croix. Derrière celle-ci, ont été mises à jour les fondations d'un temple pré-incaïque, dit Templo de la Fertilidad, restauré en 1970-1972. Lors des travaux de dégagement effectués par A. Ruiz Estrada, plusieurs pierres lithiques de type phallique furent découvertes, plantées dans le sol, à la base des fondations d'un édifice inca largement postérieur, l'Inca Uyo, de plan rectangulaire, mais sans apparement avoir été utilisées en réemploi dans la maçonnerie.
On reconnaît dans ces monolithes une lithosculpture liée au culte agraire de la fertilité. Ils seraient plus ou moins contemporains des monolithes de Pucara et dateraient de la Période Formative juste antérieure (ou parallèle) au stade initial du développement de la civilisation de Tiahuanaco. Peu avant la domination des Incas sur la région, Chucuito avait été l'un des centres principaux du royaume des Lupacas, dont l'emprise s'étendait depuis la rive sud du lac Titicaca jusqu'aux vallées chaudes de la côte du Pacifique. Plus tard, à l'époque de la colonie espagnole, elle était fameuse pour ses mines d'argent. Le minerai était fondu sur place et l'on y frappait monnaie, ce qui permet à la ville de se proclamer orgueilleusement Ciudad de la cajas reales (ville des caisses royales)...
FĂŞtes :
(premier dimanche d'octobre) : Nuestra Señora del Rosario. Processions, courses de taureaux et danses de l'Altiplano, dont la fameuse Diablada.
4 décembre : Santa Barbara. Musique et danse, marché artisanal de céramique et de tissages.


Chucuito : la place du bourg et le Temple de la Fertilité

Acora
28 000 hab. - alt. 3860 m - Puno : 36 km

Dans cette vieille bourgade d'origine indienne, on verra la belle église de San Pedro construite en briques. C'est un monument colonial de style métis, mais la façade est très inspirée du style arabe européen, dit mudéjar. A l'intérieur, une somptueuse chaire en bois sculpté et un magnifique retable, de style baroque, daté de 1771.
FĂŞtes :
15 septembre : Natividad de la Virgen - Premier dimanche d'Octobre : Fiesta de Nuestra Señora del Rosario.

Ilave
54 000 hab. - alt. 3847 m - Puno : 58 km

Deux belles églises à voir : celle de San Miguel et celle de Santa Bárbara, dont le portail est décoré de saints et de prélats sculptés en haut-relief.

Peintures rupestres de Mazo Cruz
alt. 4300 m - 85 km par la route de Tacna
Depuis Ilave, les amateurs d'art préhistorique pourront se rendre vers un des hauts-lieux de la préhistoire du Pérou (il sera nécessaire d'être accompagné d'un guide). Près du village de Mazo Cruz, au lieu-dit Keltakani, furent découvertes des grottes ornées de peintures rupestres d'époque néolithique, représentant surtout des scènes de chasse. Parmi celles-ci, on trouve de curieuses figures dites"en négatif", où les silhouettes d'hommes et d'animaux sont cernées par un large détourage en blanc. Ces peintures pariétales sont un témoignage de l'antiquité du peuplement humain de l'Altiplano : les plus anciennes remontent à 8000 ans

Photo Caretas

Amaru Muru (ou Hayu Marca)
Peu avant Juli, sur le côté droit de la route, une formation rocheuse localement dénommée Hayu Marca recèle un curieux monument qui passionne les amateurs de mystère : une grande porte rectangulaire (7 m de haut), entourée de ses deux rainures et ornée en son centre d’une niche octogonale, le tout sculpté dans une abrupte paroi de grès rouge avec une telle perfection qu’on dirait, de loin, apercevoir un modelage. Cet oratoire rupestre remontant à la période préincaïque est probablement l’œuvre des Aymaras ou des Lupacas : on y reconnaît la finesse et la précision des tailleurs de pierre de Sillustani ou de Chucuito.
Depuis longtemps connu des habitants de la région, le site n’a été « redécouvert » qu’en 1996. Son nom d’Amaru (serpent) et muru (œuf, graine) laisse à penser qu’on y rendait un culte au serpent.  La niche située en bas de la structure excite les imaginations : certains y voient une « porte des dieux » ou qui sait, une entrée vers la quatrième dimension. Des légendes circulent, racontant que les rares mortels ayant réussi à franchir cette porte n’en seraient jamais ressorti…


La mystérieuse "porte" de l'Amaru Muru

JULI
25 000 hab. - alt. 3 870 m - Puno : 85 km
Fondée par les Espagnols en 1565, cette petite ville blottie au fond de sa baie fut au temps de la colonie le grand centre religieux de l'altiplano, d'où rayonna l'art métis du Titicaca, fameux pour sa sculpture d'inspiration naïve et indigène. Elle conserve de son riche passé colonial quatre églises qui lui ont valu son surnom de Rome du Titicaca. Juli fut à cette époque l'enjeu de l'intense rivalité qui opposait les Dominicains aux Jésuites : elle fut d'abord un fief dominicain jusqu'en 1579, date où ils furent expulsés et remplacés par les Jésuites qui y créèrent un séminaire où furent formés les frères qui allaient plus tard fonder les missions du Paraguay. C'est sur les presses de l'Ordre à Juli que le jésuite italien Ludovico Bertoni fit imprimer vers 1612 son Vocabulario de la lengua Aymara, l'un des premiers livres imprimés au Pérou.
Sur la Plaza de Armas, où se trouve la Casa de la Inquisicion, à façade plateresque, l'église de San Pedro s'ouvre par un portail sculpté du 17e s., flanqué d'une puissante tour à décor baroque. A l'intérieur, voir le retable principal et surtout un chemin de croix sculpté sur des planches de bronze, travail d'une école italienne (18e s.).
L'église de San Juan de Letrán en dehors de son aspect massif et rustique, présente un portail latéral (18e s.) de style baroque indien, où sont par exemple sculptés des colibris. A l'intérieur, retables et tableaux baroques forment un ensemble d'une grande richesse.
L'église de la Asunción est précédée d'un large escalier surmontée d'un arc élegamment sculpté. Depuis cet atrium, on peut apprécier le portail orné de médaillons portant le monogramme de la Compagnie de Jésus. A gauche, le campanile à couronnement sculpté a été en partie mutilé.
L'église de la Santa Cruz, située près du cimetière, présente un grand portail sculpté flanqué d'un clocher imposant. L'intérieur est malheureusement ruiné.

Pomata
20 000 hab. - alt. 3847 m - Puno : 110 km
Cette petite ville où vinrent s'installer vers 1680 les Domincains chassés de Juli, possède un autre joyau architectural du lac Titicaca, l'église de Santiago Apostol, solide construction du 18e s. en pierre rouge, dont le portail central est connu pour son style plateresque aux sculptures d'inspiration très indigène, dans un foisonnement de détails naïfs que l'on retrouve aussi à l'intérieur. Sa magnifique tour couronnée d'une coupole fait penser aux clochers de Cuzco.
FĂŞtes :
25 Juillet : Santiago Apostol. Procession, danses, courses de taureaux - 10 Août : Feria de las Alacitas - Premier dimanche d'Octobre : Fiesta de Nuestra Señora del Rosario.


COPACABANA (Bolivie)
Puno : 147 km
Peu après Pomata, une route conduit vers le village de Yunguyo, situé sur l'isthme qui sépare la plus vaste étendue du lac de sa partie Sud, appellée lac de Wiñaymarca. Yunguyo est aussi le poste frontalier permettant l'accès à la péninsule de Copacabana, qui appartient à la Bolivie et qui est séparée de l'autre rive (également bolivienne à cet endroit) par le passage le plus étroit du lac Titicaca, le détroit de Tiquina.

Située au bord du lac, cette petite ville fut fondée par l'Inca Tupac Yupanqui à l'emplacement du centre sacré de la culture Chiripa (400 avant J.-C.), afin d'établir une étape pour les pèlerins qui se rendaient à l'île du Soleil. Aujourd'hui, elle est célèbre pour son pèlerinage à la Vierge Noire. Appelée aussi La Candelaria, ou la "Madona del Lago", elle est très vénérée par les Boliviens mais aussi par les Péruviens. Trois fois par an, de somptueux pèlerinages donnent à cette petite ville une animation et un cachet extraordinaires qu'il convient de ne pas manquer. En-dehors de ces fêtes religieuses, Copacabana est un charmant lieu de villégiature (très fréquenté par les touristes en saison), d'où l'on propose des excursions en bateau vers les deux îles légendaires de Titicaca (ou île du Soleil) et de Coati (ou île de la Lune) sur lesquelles les incas avaient bâti des temples et des monastères dont il subsiste d'imposants vestiges.

Basilique
Achevée vers 1820, sa construction aura duré presque deux siècles. C’est un vaste édifice de style mauresque, d’un blanc immaculé, qui tranche avec les vieilles églises coloniales de la région. La statue de la Vierge de Copacabana est conservée – à la lueur de centaines des cierges toujours allumés - dans une chapelle latérale, la Capilla de Velas (ouv. 9h-12h et 15h-18h).

Cerro Calvario
En partant de la Plaza Sucre, on attaque un sentier pentu qui mène (1h env.) à cette colline (3966 m) surplombant les rives du lac. Il est jalonné de quatorze croix, représentant chacune un épisode de la vie du Christ. Du sommet, splendide vue sur la ville, la basilique et la péninsule de Copacabana.

Péninsule de Copacabana
Une randonnée pédestre (4 à 5h de marche) jusqu’au bout de la péninsule de Copacabana  (17 km) peut être un autre moyen (moins fréquenté) de se diriger vers les îles du Soleil et de la Lune, car à sa pointe, on trouvera un embarcadère par le chemin lacustre le plus court, franchissant seulement le détroit de Yampupata (2 km de large). La piste passe par les villages de Chani, Titicachi et Sicuani (3h30) avant de parvenir à Yampupata.

ĂŽles du Soleil et de la Lune (islas del Sol y de la Luna)
Une excursion vers ces îles mythiques est indispensable à tout passionné de l’histoire inca, puisque ce serait ici même que seraient nés Manco Capac et Mama Ocllo, les fondateurs de cet empire. Ici, après le Déluge, le dieu Viracocha aurait surgi des eaux, leur enjoignant d’aller fonder un royaume prospère, vers le Nord. A vrai dire, ce n’est pas de l’histoire, mais de la légende. Qu’importe. Le moyen le plus commode de les découvrir est de réserver un circuit organisé d’une journée dans une des petites agences de Copacabana. Assurez-vous qu’il passe bien par la Isla de la Luna au retour (ce n’est pas toujours le cas). Evitez le tour d’une demi-journée, express et un peu trop bâclé. L’embarcadère se trouve au bout de la rue 6 de Agosto, en partant de la Plaza 2 de Febrero et en traversant la Plaza Sucre. Selon l’affluence, il y a un ou deux départs en matinée, à 8h et 9h. La traversée, magnifique, dure 2h, longeant d’abord la longue arête de la péninsule de Copacabana puis débouchant sur le détroit de Yampupata, devant lequel se dresse l’île du Soleil.

Les bateaux débarquent à Challapampa au Nord de la Isla del Sol - également nommée Isla Titicaca - c’est elle qui a donné son nom au lac : avant l’arrivée des incas, les aymaras y vénéraient une pierre sacrée, recouverte de plaques d’or et d’argent qu’ils appellaient « Titicaca ». A Challapampa, on verra le Museo Marka Pampa qui présente le résultats des fouilles entreprises dans l’île. Un sentier mène ensuite au Templo del Sol édifié par les incas dont il ne reste que de maigres vestiges. Plus intéressant est le Palacio del Inca, ou Chinkana, 1km plus loin en poussant vers la pointe de l’île. On y parcourt un dédale de salles en ruines dont certaines ont des portes trapézoïdales en pierre taillée. Tout proche de là, sur la rive Nord de l’île se dresse une énorme pierre grise, le rocher du Titicaca, qui lorsqu’on la voit en bateau, aurait la forme d’un puma. Pour gagner le Sud de l’île, une belle randonnée (3h env.) suit la ligne de crête, permettant d’avoir de magnifiques vues sur les deux rives du lac, notamment le côté bolivien où se déploie la fastueuse Cordillera Real. Sur la pointe Sud, un grand escalier assez raide, la Escalera del Inca, conduit à une fontaine d’eau douce, la seule de l’île où viennent puiser ses habitants, sans doute depuis des millénaires.

Les bateaux repartent généralement de la Isla del Sol vers 16h. Sur le chemin du retour, ils font escale à la Isla de la Luna, ou isla de Coati, à la superficie beaucoup plus réduite. Les incas y bâtirent un acclahuasi, ou maison des vierges du Soleil  qui était l’une des plus réputées de l’empire. Le site a malheureusement subi d'importantes destructions : ne sont plus guère visibles que ses longs murs d’argile.

De la péninsule de Copacabana, il est possible de franchir le détroit de Tiquina par un bac qui rejoint la rive nord (bolivienne) d'où une route conduit directement à la Paz (150 km). Pour continuer sur la rive sud (péruvienne), il faut repasser le poste-frontière de Yunguyo.


Zepita
30 000 hab. - alt. 3812 m - Puno : 143 km - Desaguadero : 11 km

Près de la frontière bolivienne, cette bourgade située au fond du lac de Wiñaymarca mérite un arrêt pour y admirer son église de la première moitié du 17e s., dont l'extraordinaire portail de pierre rouge est considéré comme l'un des chefs-d'oeuvre de l'architecture coloniale de l'Altiplano. D'inspiration très indigène, il est sculpté de fleurs, de palmes, de personnages et de masques de félins.

Desaguadero - Puno : 154 km - Tiahuanaco : 43 km - La Paz : 120 km
Poste frontière péruvien, situé sur le rio du même nom, qui sert d'exutoire aux eaux du lac Titicaca. Attention : la frontière n'est ouverte que de 8h à 12 h et de 14h à 18h. Pour ceux qui voudraient revenir vers la côte Pacifique sans repasser par Puno, une route récemment ouverte conduit directement de Desaguadero à Moquegua (300 km).

Passé le poste frontière bolivien, des omnibus et des taxis collectifs conduisent à La Paz en passant par le port lacustre bolivien de Guaqui et le site archéologique de Tiahuanaco


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