ayacucho_artesania

De toutes les régions du Pérou, Ayacucho est certainement l'une de celles qui possèdent les plus riches traditions artisanales, notamment dans la céramique.

Le foyer en est au village de Quinua à 37 km au Nord d'Ayacucho. Quinua est célèbre au Pérou pour son artisanat de céramique rougeâtre qui donne lieu à une grande variété de formes et de motifs : teaureaux, églises, candélabres, plats, cènes, personnages de la crèche, muletiers, musiciens, etc. Les nombreux ateliers de poterie ont pignon sur rue et vendent leur production à des prix évidemment plus bas que dans les boutiques d'Ayacucho et de Lima. Les maisons de Quinua présentent toutes, au faîte de leurs toitures en tuiles rouges, de petites figurines en céramique disposées en guise d'offrandes.

L'autre grande spécialité artisanale d'Ayacucho est le retable en bois peint, généralement en blanc, avec des décors floraux rouge et bleu. A l'intérieur, sur plusieurs niveaux, et suivant la taille du retable, on trouve une multitude de scènes fourmillant de personnages : crèches indiennes, scènes de la vie paysanne ou villageoise, réalisées en pâte vernie. La popularité de ces retables "laïques" a une origine évidemment religieuse. Le retable fut apporté au Pérou par les Espagnols, aux 16e et 17e s. et les missionnaires chargés d'évangéliser les populations indiennes en emportaient toujours avec eux. Au 18e s., naquit au Pérou la tradition du "Cajon de San Marcos" qui était un petit retable généralement réalisé par des artisans métis pour le compte des propriétaires de bétail : au premier niveau, on trouvait une scène profane (bergers, animaux) et au-dessus, une scène religieuse. Ces petits coffrets de bois contenant l'effigie d'un saint, était censé protéger le voyageur et ses animaux contre les périls d'un long voyage à travers les cordillères. La tradition du retable "populiste" vient de là.

La grande figure du retable d'Ayacucho est Joaquin Lopez Antay (1900-1981), dont le grand-père était déjà, au 19e s., un grand maître du travail sur l'argent. Il a son musée sur la Plaza de Armas, installé dans une ancienne demeure coloniale. Parmi ses élèves se détache l'art de Florentino Jimenez qui inventa une variante "patriotique" du retable, en lui donnant la forme d'un ecusson, dans lequel il représente des scènes historiques ou sociales (batailles, travaux des champs, travail dans les mines). Mais l'artiste le plus accompli de cette école est Jesus Urbano Rojas (né en 1925), aussi habile a réaliser des grands retables, des santons et des sujets de terre cuite. En 1963, il fonda sa propre école qui fut officalisée et subventionnée en 1979. De nos jours, Nicario Jiménez Quispe (né en 1957 près d'Ayacucho) est aujourd'hui l'un des artistes les plus fameux dans cette discipline

A g. : Joaquin Lopez Antay - à dr. : Cène "métisse" de Jesús Urbano Rojas.

Outre la céramique et les retables, Ayacucho propose aussi une intéressante école de tissus décoratifs, ornés de motifs géométriques aux couleurs vives, ou de paysages andins. Les tisserands d'Ayacucho se regroupent, traditionellement, dans le quartier de Santa Ana. Les santons, vernis et peints, dérivent de l'art du retable, ainsi que les petits personnages taillés dans la "pierre de huamanga" (nom local de l'albâtre) d'une blancheur éclatante. Durant l'époque coloniale, cette sculpture sur albâtre fut florissante et le scréations des artistes, qui s'inspiraient souvent de modèles européens (lions héraldiques, bergers et nymphes) ornaient les riches demeures de l'aristocratie locale.

Les cadres en bois sculpté et doré, le travail de l'argenterie (notamment les bijoux réalisés en filigrane d'argent) sont également des spécialités locales tout comme les objets religieux, dont l'expression la plus typique est la "Cruz Ayacuchana", crucifix posé sur un socle où, autour de la figure du Christ, fourmille toute une décoration de fleurs, de petits personnages et de symboles magico-religieux du monde paysan.

Personnages sculptés en albâtre, ou pierre de Huamanga