Sacrifices
Il semble que le lama ait été, au temps des incas, l'objet le plus courant des sacrifices religieux. Le prêtre le faisait tourner plusieurs fois autour de l'idole et l'égorgeait en lui tenant la tête en direction de cette divinité. Chaque matin, au Cuzco, un de ces animaux était ainsi tué, puis brûlé, en offrande au Soleil. Un brasier était entretenu à cet effet. En outre, le premier jour du mois, cent lamas étaient jetés au feu avec du maïs et de la coca, parmi les prières.
Les plus réputées et efficaces des offrandes étaient celles d'hommes vivants, mais il semblerait que les incas, contrairement aux aztèques, ne les aient pratiqué qu'à titre exceptionnel. Des enfants ou des jeunes gens étaient mis à mort lors d'une cérémonie de sacrifices collectifs connue sous le terme de "capacocha". On choisissait les plus beaux d'entre eux, on les nourrissait bien, on les enivrait avec de la chicha ou on les anesthésiait en leur faisant absorber des doses massives de coca, puis on les faisait tourner deux ou trois fois autour de l'idole, comme les lamas, et on les étranglait. Ces sacrifices humains avaient lieu par exemple lors d'une maladie de l'lnca ou de l'entrée en guerre contre une nation puissante.
On a attribué à Manco Capac l'invention de ces horribles pratiques. L'étymologie indécise du mot capacocha semble indiquer que cette sorte de sacrifice remonte à la plus haute antiquité. En même temps que d'autres éléments, les Incas auraient emprunté la capacocha au culte indien primitif.

 
Sacrifice d'un lama
(dessin de Guaman Poma).

A Pachacamac, ce sont des Vierges du Soleil qui étaient sacrifiées. L'archéologue Max Uhle a trouvé des restes de ces jeunes filles dont la mort a été violente et qui n'ont pas été tuées en punition d'une faute, car leur cadavre était entouré d'objets familiers,comme il était d'usage lors des enterrements des grands personnages.
La "capacocha" avait un caractère de masse qui ne semble pas avoir été le même dans le Sud du Pérou, où l'on a retrouvé des cadavres momifiés par le gel d'enfants sacrifiés sur de très hauts sommets (cf la fameuse momie de Juanita, à Arequipa). Dans ce cas la destination purement religieuse des sacrifices ne fait aucun doute.

SALINAR (céramique)
La céramique de Salinar, dans la vallée du Rio Chicama, au nord de Trujillo, fut découverte en 1941. Cette culture appartient à ce que l'archéologue Federico Kaufman Doig appelle la "Période de diversification", allant de 200 avant J.-C. jusqu'à 200 après J.-C. Elle est contemporaine de celle de Virú (juste au sud de Trujillo) et des phases Paracas-Cavernas et Paracas-Necropolis sur la Côte Sud.La céramique de Salinar nous est surtout connue par sa poterie funéraire qui appartient au style blanc sur rouge. Cette céramique eut une influence certaine, avec celles de vicus et de Gallinazo, sur l'avènement de la culture Mochica.
Les vases de Salinar, comme les vases de la période antérieure de Cupisnique, sont soigneusement modelés et prennent les formes les plus diverses : ils sont fréquemment décorés de figures humaines, animales ou d'oiseaux. Les figurines modelées formant le corps du vase sont assez rares et ne sont plus aussi naturelles d'allure que dans le style du Cupisnique. Les figurines humaines sont des caricatures, extrêmement vivantes, peu ou pas habillées, parfois représentées dans des attitudes érotiques qui préfigurent l'art mochica. Quelques vases de Salinar portent une décoration géométrique, lignes blanches ou triangles remplis de points peints directement sur la surface rouge du vase. Les tombes dans lesquelles ces vases ont été trouvés révèlent des corps enterrés dans une position allongée. La fosse est en général recouverte de plaques de pierre ou de poutres. Quelques corps ont été retrouvés portant dans la bouche une plaquette en or, ronde ou ovale, coutume qui réapparaîtra à une époque plus récente.

Sapa-Inca
Littéralement en quechua : "le suprême souverain". Le mot sapa (qui ne pouvait être accolé qu'avec celui d'Inca) signifiant suprême, supérieur, etc.

SAYHUITE (Pierre de)
A 45 km à l'Est d'Abancay, par la route conduisant vers Cuzco, se dresse l'un des plus curieux monuments mégalithiques de l'époque inca : la fameuse "pierre" de Sayhuite, bloc isolé de plusieurs tonnes, mesurant près de 4 m de diamètre. Elle est sculptée sur l'une de ses faces, représentant une sorte de carte géographique en relief, ou de maquette du monde, sous forme symbolique. Les condors figurent les montagnes andines; les singes, les serpents, les pumas figurent les grandes forêts des Andes orientales et de la selva, les lamas les hautes terres de l'altiplano. D'autres reliefs montrent des indiens en sentinelle.
Cette pierre, dont on ignore sous quel règne elle a pu être sculptée, passe en général pour être une maquette du Tahuantinsuyo, c'est-à-dire de l'empire Inca. Le site archéologique de Sayhuite comprend en outre des traces d'habitations et les ruines d'un grand temple, ainsi que des restes de travaux hydrauliques avec un système de canaux et de fontaines.


La pierre de Sayhuite

SECHÍN (Cerro)
Peu avant d'arriver à Casma (375 km au nord de Lima), en suivant à droite sur 2 km la route qui mène vers Pariacoto et Huaraz, on parvient au flanc d'une petite colline rocheuse connue sous le nom de Cerro Sechín, qui domine la rive gauche du petit fleuve côtier portant le même nom. Le fameux archéologue Julio C. Tello y mit à jour, en 1937, les ruines d'un temple datant de la Période Formative (1er millénaire av. J.-C.) qui est l'un des monuments les plus curieux de la côte nord du Pérou.
Sur la face extérieure des quatre côtés de son enceinte (longs de 50 m chacun) sont plaqués des stèles, ou monolithes plats, sur lesquels furent gravés des figures en lignes incisives représentant, en grandeur nature, un défilé de guerriers victorieux dont certains portent des restes humains : jambes, bras, viscères et une grande quantité de têtes coupées gardant des expressions de douleur. Ces scènes de carnage sont reproduites sur la centaine de monolithes qui entourent les vestiges du temple proprement dit, construit en blocs d'adobes coniques sur lesquels on trouve quelques traces d'enduit et de peinture.

Sechín, rivale de Caral ?
Le temple de Cerro Sechin n'est aujourd'hui que la partie visible et visitable d'un immense ensemble archéologique de la période du Précéramique, presque contemporain à celui de Caral, mais plus important en superficie et en nombre de constructions. Sur les collines situées au nord-est du temple, s'étend sur près de 200ha un très vaste complexe archéologique en cours de fouilles, Sechín Alto. Le bâtiment principal est un temple en U, construction représentative de l'époque du Formatif ancien, qui étonne par l'ampleur de ses dimensions : sa pyramide - revêtue de blocs de granit - atteint une hauteur de 45 m dominant une plateforme de 300 m de côté sur 250, ce qui en ferait le plus grand monument de l'Amérique précolombienne à la fin du second millénaire avant J.-C. Les esplanades, au nombre de cinq, sont creusées de puits circulaires, comme à Caral, mais de dimensions largement supérieures, variant de 50 à 80 m de diamètre.

Au nord-ouest, sur l'autre rive dr. du Río Sechín, s'étend encore le complexe de Sechín Bajo, qui semble le plus ancien de tous, les datations révélant une antiquité de 5500 ans, comme à Caral. Des excavations récentes (2008) ont mis à jour une place cérémonielle semi enterrée ainsi qu'une frise murale sculptée en haut-relief, dite "El Degollador" (le coupeur de têtes), d'un style plus archaïque que les stèles de Cerro Sechín.

SICÁN voir : LAMBAYEQUE

SILLUSTANI (Chullpas de)
A une vingtaine de kms à l'Ouest du lac Titicaca et dominant le lac Umayo à une altitude de 3900 m, Sillustani est l'un des sites les plus énigmatiques de la civilisation des Aymaras, ou Collas.
Après avoir dépassé l'ancienne bourgade de Hatuncolla, on parvient sur une vaste esplanade formant une sorte de belvédère dominant le lac, où se dressent de petites tours funéraires d'environ 9 m de haut, de forme circulaire, les chullpas. Dans leur partie supérieure, une corniche en saillie romp avec la monotonie de la paroi. Certaines présentent des sculptures sur le pourtour extérieur. Parmi les plus importantes et les plus connues, celle dite du Lagarto (le Lézard) mesure 12 m de haut et 4,80 m de diamètre.
On trouve dans ce gisement de grands cercles constitués de pierres enfoncées dans le sol. Le plus grand mesure 15 m de diamètre. On leur suppose une fin rituelle ou cérémonielle.
Lors de fouilles réalisée en 1971, l'archéologue Arturo Ruiz Estrada découvrit un extraordinaire ensemble de plus de 500 objets d'or au pied de la tour du Lagarto. Ce "trésor de Sillustani" est aujourd'hui conservé au musée Carlos Dreyer de Puno.


Une des chullpas de Sillustani, face au lac Umayo.

SIPÁN (Seigneur de) voir page : La très riche tombe du Seigneur de SIPÁN

Société (chez les incas)
L'organisation sociale de l'empire des Incas vers son apogée, s'est formalisée sous le règne du dizième Inca, Tupac Yupanqui. Celui-ci acheva d'établir une triple hiérarchie civile, religieuse et politique dont il était l'unique sommet. Dans l'ordre civil, les familles étaient groupées par dix, cent, mille et dix mille, chaque unité statistique soumise à un chef de rang correspondant. Tout l'empire ainsi articulé se partageait en quatre provinces commandées chacune par un dignitaire de sang royal. Les prêtres, depuis les devins de village et les balayeurs de temples, s'échelonnaient sous un pontife suprême. le Villac Oma, qui était le propre frère de l'empereur. Dans l'ordre politique enfin, l'Inca dominait la classe des Incas de naissance, ses parents, dont le nombre était maintenu et accru par son immense polygamie. Au-dessous d'elle se rangeaient les Incas par privilège, issus des princes soumis, puis les curacas ou chefs de village, enfin le bas peuple.
L'existence de ce dernier était régie par un dirigisme total, qui a séduit autant que révolté les consciences européennes, mais qui probablement demeurait théorique dans bien des cas. Le vêtement, l'éducation, le culte, le travail de la terre comme sa répartition, le service militaire, jusqu'au mariage : la législation incaïque aurait tout englobé. Ainsi l'on a pu parler aussi bien, au 20e siècle "d'empire socialiste et d'état totalitaire", selon l'expression de Louis Baudin.

Songes (interprétation des)
"Les Incas prétendaient que l'âme sortait du corps tandis que celui-ci dormait, parce qu'elle-même ne pouvait dormir, et que se promenant de par le monde, elle voyait des choses que nous disons avoir rêvées. En raison de cette croyance, ils accordaient une grande attention aux songes et les interprétaient, disant qu'ils étaient autant d'augures et de présages, et que d'après eux, les hommes pouvaient craindre de nombreux maux ou espérer de grands biens".
(Garcilaso de la Vega : Commentaires royaux, II, 7).

Supay (ou Supay Yupanqui)
Supay, dans la mythologie andine, est une force surnaturelle puissante, tantôt bonne, tantôt mauvaise. Après la colonisation et la catéchisation forcée des indiens, et le syncrétisme qui en a résulté, il a conservé dans les mentalités andines le sens christianisé de "Diable, Démon". Pour les mineurs, il était aussi le dieu mauvais des galeries souterraines, que l'on appelle parfois le "muki".


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©Daniel DUGUAY / dduguay@club-internet.fr


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