Maïs
On date généralement l'apparition du maïs au Pérou entre 4000 et 3000 avant J.-C. : il y aurait été introduit par des flux migratoires venus d'Amérique Centrale. Entre tous les produits alimentaires de l'ancien Pérou, le maïs, pour sa grande valeur nutritive et énergétique, tient une place prépondérante. Il peut être cultivé sur les plateaux côtiers jusque dans la sierra, même au-dessus de 3500 m d'altitude.
Du maïs, sara en quechua, on connaît plusieurs variétés péruviennes qui se distinguent par la taille et la forme de ses fanes (mazorca en espagnol), par la couleur de l'épi (choclo) : blanc, jaune, violet, rougeâtre, et la consistance de ses grains.
Il était consommé sous bien des formes : en mote (les grains bouillis et passés dans la cendre), en cancha (grillé), en chochoca (purée de maïs bouilli).
A base de maïs fermenté, on préparait la boisson dénommée Asua en quechua, que l'on dénomma ensuite chicha, ce terme centro-américain ayant été introduit au Pérou par les Espagnols. La chicha était par excellence la boisson servie dans les fêtes, dans les cultes et pendant les cérémonies agraires.
La humita était, pour ainsi dire le "pain" des incas. Elle était obtenue en broyant au mortier des grains tendres de maïs blanc. La farine ainsi obtenue, mélangée avec de l'eau, formait une pâte que l'on enveloppait dans les feuilles (Pancas) de la plante et que l'on faisait cuire au bain-marie. Les fameux tamales étaient préparés de la même façon, mais avec de la farine de maïs rouge. Tous ces mets sont encore largement consommés aujourd'hui au Pérou. Certaines variétés d' humitas, celles qui par exemple, étaient préparées pour les festivités religieuses, se voyaient mélangées à du sang d'animaux sacrifiés à des fins magiques : cette préparation était appellée sanku.

MANCO CAPAC voir page : Les Treize Incas du "Tahuantinsuyo"

MARANGA-LIMA, ou LIMA (culture) voir page : Lima préhispanique

Mariage
L'amour, dans la société inca, basée sur le travailplutôt que sur le plaisir, était synonyme de mariage. D'ailleurs, le mariage établissait davantage l'union des forces que celle des cœurs. Pas beaucoup de romantisme pour les indiens : surveillés par des parents qui s'étaient mis d'accord, les jeunes couples entreprenaient un "mariage à l'essai" qui durait quelques jours ou plusieurs années.
Ce mariage était obligatoire et l'âge limite en était fixé à trente ans. Il s'agissait donc de trouver, pour l'homme, une femme qui travaillât le mieux possible et pour la femme, un époux au caractère supportable. La virginité n'avait pas la même valeur pour les jeunes indiennes que dans les civilisations judéo-chrétiennes et sa perte, avant le mariage, n'était pas considérée comme un déshonneur, bien au contraire.
Si des enfants naissaient d'un "mariage à l'essai" qui ne connaissait pas d'issue durable, ils étaient à la charge des parents de la mère, sans pour autant représenter un fardeau : ceux-ci voyant en eux davantage de futures paires de bras que des bouches supplémentaires. L'Inca veillerait d'ailleurs à ce qu'ils n'aient pas faim.
Quant au mariage définitif, célébré devant le curaca ou tout autre représentant des autorités, il permettait au jeune homme d'obtenir une certaine indépendance (relative) face au pouvoir paternel : celle de posséder sa propre chaumière et son lopin de terre. Il était, en principe, indissoluble.

Marka
Dans les deux principales langues des Andes, le quechua et l'aymara, ce mot marka a le même sens, défini par Louis Baudin : "le village et son territoire". On le retrouve d'ailleurs en tant que suffixe dans de nombreux toponymes du Pérou préhispanique, mais avec le sens de "ville ou village fortifié" : Marka Huamacuco, Pampamarca, etc.

Mascapaycha
Frange de tissu rouge qui pendait de la coiffe de l'Inca et recouvrait la partie supérieure de son visage lors de ses apparitions publiques ou de ses sorties en litière.

Mate
Nom scientifique : Lagenaria vulgaris. Fruit sec ou calebasse. Evidée et partagée en deux horizontalement, forme le maté qui sert au Pérou, depuis l'antiquité, de plat, assiette, bol, et même bouteille ou boîte, selon la forme.
L'artisanat local fournit encore de magnifiques mates burilados (burinés) ou pyrogravés, très richement travaillés et ornés d'une foule de petites scènes. Mais les plus anciennes pièces sont de véritables oeuvres d'art.

Médecine et chirurgie
Au temps des Incas, et probablement parmi les civilisations qui les ont précédé, la médecine empirique fut pratiquée, en relation étroite avec les pratiques magiques et religieuses. Les maladies étaient suposées avoir été causées par une "frayeur" (susto , en espagnol), c'est-à-dire par une brusque séparation de l'âme et du corps, ou alors par un péché, ou bien par un maléfice dû à l'action d'un sorcier.
Le "soigneur", était aussi un devin (le mot espagnol est curandero ) car il devait d'abord diagnostiquer la cause du mal avant de proposer les remèdes appropriés, à base de rituels magiques et d'herbes médicinales. On pratiquait également, depuis des temps très reculés, des interventions chirurgicales qui aujourd'hui encore forcent l'admiration, parmi lesquelles les fameuses trépanations crâniennes dont on a retrouvé de nombreuses traces sur des squelettes et des momies. Ces trépanations étaient pratiquées pour éliminer les fragments d'os brisés suite à des contusions accidentelles, des blessures de guerre (coups de massue par exemple) ou bien pour libérer le patient des mauvais esprits dans le cas des maladies mentales.
Les instruments chirurgicaux en vigueur étaient - comme pour les sacrifices - le classique tumi , ou couteau de cuivre à la lame arrondie, des tranchets d'obsidienne, des aiguilles et des pinces en os. Les pansements de coton et la gaze étaient connus depuis l'époque de Paracas. Quant à la coca, elle constituait un anesthésiant idéal, à laquelle on devait adjoindre la chicha fermentée, absorbée en grande quantité.

Métallurgie et métaux chez les Incas
Les Incas ne connaissaient pas le fer. Ils utilisèrent donc la pierre et le cuivre pour fabriquer leurs outils, alliant ce dernier à l'étain pour obtenir le bronze. Ils acquérirent cependant une maitrise excellente du travail des métaux précieux tels que l'or, l'argent et le platine. Ce dernier n'était guère connu en Europe et ne le fut qu'à partir de 1730.
Les pépites étaient extraites du lit des rivières. martelees et converties en feuilles pouvant être façonnées. On dégageait aussi de l'or de mines à ciel ouvert ou de galeries peu profondes. Les Indiens creusaient la terre au moyen de pics munis de bois de cerfs ou encore de manches à pointes de cuivre. Une fois extrait des filons, le minerai était fondu dans des fours percés d'ouvertures laissant passer l'air.

Le travail des métaux était destiné plus directement à la décoration qu'à des fins utilitaires. Les ateliers fournissaient. en premier lieu. les longues plaques qui devaient recouvrir en partie les murs des temples et des palais. Les orfèvres fabriquaient les bijoux réservés exclusivement à l'empereur et aux hauts dignitaires : pendentifs. bracelets et surtout disques fixés aux oreilles des grands. A cela s'ajoutaient de nombreux objets de culte, parmi lesquels le fameux tumi, couteau de sacrifice en forme de demi-lune, déjà à l'honneur à l'époque Mochica.
Si les mines d'or et d'argent appartenaient exclusivement à l'Inca. c'étaient les curacas qui se trouvaient chargés de veiller à leur exploitation. Les gisements étaient sous surveillance incessante. de peur que ne fût volé quelque déchet des précieux métaux.
A leur arrivée, les Espagnols découvrirent avec étonnement un étrange "or blanc", alliage de platine. d'or et d'argent. Obtenu à des fins religieuses. ce métal était réservé au temple de la Lune, dont il avait la couleur. Les Espagnols racontèrent en avoir trouvé une plaque de plus de huit mètres de long.
Le gisement le plus important était celui de Potosi, à 4800 m d'altitude. Ce furent surtout les Espagnols qui l'exploitèrent, suivant le système de l'encomienda, reprenant à leur compte les structures mises en place par les Incas. Le travail des mineurs, qui n'avait jamais été facile, devint, après la conquête, un long et terrible calvaire qui débouchait inévitablement sur la mort.


Atelier d'orfèvrerie (gravure du 17e s.)

Mita
Mot quechua signifiant le "tour", c'est-à-dire la corvée, dûe au service du Soleil ou à celui de l'Inca. Les paysans recrutés pour la corvée furent dénommés "mitayos"par les Espagnols qui détournèrent cet usage à leur profit dans le terrible système colonial de l'encomienda.

Mitimaes (ou Mitmaq)
Groupe de familles, parfois tout un ayllu (communauté agricole) que les Incas déplaçaient autoritairement, soit pour coloniser des régions désertes et nouvellement conquises, soit en manière de punition. C'est l'un des rares mots quechua qui est passé dans la langue française : de là viendrait le mot "micmac".

MOCHICA (civilisation)

MORAY
L'ensemble de ces ruines, situées dans la province d'Urubamba à 40 km environ au Nord-Ouest de Cuzco, s'élève à 3437 m d'altitude. Ces restes archéologiques mis à jour en 1930 par l'expédition Shippe-Johnson, sont constitués de quatre groupes de constructions circulaires concentriques, s'élargissant vers le haut. Chacun de ces cercles comprend une terrasse, celle-ci superposée à une autre, formant des anneaux de plus en plus grands à mesure que l'on atteint la superficie. L'ensemble de ces terre-pleins, soutenus par des murs lithiques de type cellulaire, devaient être irrigués par un système de canaux appropriés. Chaque groupe compte jusqu'à sept murs de soutènement. L'ensemble atteint une profondeur de 150 m.
Ces réalisations durent servir, à l'époque inca, de jardin d'acclimatation, sorte de centre d'étude agronomique avant la lettre, où le but recherché était d'améliorer les plantes cultivées dans tout l'empire. Les deux petites habitations, au fond du second groupe, étaient peut-être la demeure des botanistes ou des gardiens de ces "jardins suspendus".

MOXEKE
Site archéologique situé sur la rive droite du rio Casma, peu avant le confluent de ce dernier avec le rio Sechin (côte nord du Pérou). Appartenant à la Période Formative (à partir de 1500 avant J.-C), ce temple de vastes proportions est une construction pyramidale comprenant sept plateformes superposées dont le sommet devait être couronné de deux adoratoires surélevés, symétriquement disposés l'un à côté de l'autre.
Il fut exploré et décrit par Middendorf au 19e s. mais il fallut attendre l'expédition dirigée par J-C Tello en 1930, pour que soient mis au jour, sur la troisième plateforme de la façade, les niches renfermant des reliefs de terre séchée recouverts d'argile, des adobes de pierre et de boue séchée coniques ornées de représentations de félins, de serpents et d'êtres humains dans le style de Chavin, peints en jaune, blanc, noir et rouge.
Sur les six grandes idoles antropomorphes, quatre sont hélas très détériorées, les deux restantes, en meilleur état, sont en fait deux têtes isolées encastrées dans des niches de plus petites dimensions, assez semblables dans leur disposition aux têtes de félins de style chavinoïde d'un site peu éloigné, celui de Caballo Muerto. On en verra quelques reproductions dans le musée du site de Cerro Sechín.


Relief de Moxeque (reconstitution) - Musée de Cerro Sechín (photo D. Duguay)

Musique et poésie
Ces deux arts - intimement liés - remontant à une tradition déjà millénaire, étaient abondamment pratiqués au temps des incas, non seulement à l'occasion des fêtes du calendrier, mais aussi à l'occasion des travaux collectifs et des récoltes.
Parmi les instruments de musique purement précolombiens, on relève les grelots (cascabeles en espagnol, ou shacchas en quechua) avec lesquels on donnait le rythme pendant les danses; ils étaient généralement placés sous les genoux des danseurs et étaient faits de métal, d'écorce ou de pépins de fruits. Dans la famille des instruments à air, on trouvait la trompe, la flute de pan ou antara, faite de tubes de roseaux de longueurs différentes, la flûte à encoche ou quena, en bois ou en os; ainsi que le fameux pututo, sorte de conque d'un gros escargot de mer (le spondylus ou strombe géant) qu'on ne trouve que dans la mer des Caraïbes et qui faisait l'objet d'un intense commerce maritime entre les côtes du Panama, de l'Equateur et du Pérou. Les instruments à percussion étaient surtout des tambours, faits en cuir de lama et parfois, de peau humaine extraite du corps d'un ennemi vaincu. Les petits tambourins, ou tinyas , étaient surtout utilisés pour rythmer les travaux des champs.


De g. à dr. : antara, ou flûte de pan, quena, pututo et tinya (tambourin)

Les mélodies indiennes, que l'on peut encore entendre dans toute leur pureté dans certaines régions des Andes, ne comportaient que des gammes pentatoniques, sans harmonisation ni modulation. Plus tard, avec le métissage espagnol, s'est ajouté au vieux modes à cinq tons des valeurs de l'échelle européenne - accords et cadences en majeur ou mineur. Un instrument aujourd'hui très répandu chez les indiens comme chez les métis, est le charango, sorte de mandoline à cinq cordes tendues sur la carapace d'un tatou. Il est postérieur à la Conquête, car les instruments à corde étaient inconnus dans le Pérou préhispanique.

La poésie Inca, en dépit du manque d'écriture, est restée vivace pendant des siècles et a été recompilée par les chroniqueurs. C'est une poésie épique et légendaire, dont les thèmes principaux sont fournis par la mythologie des origines incaïques, ou par les hauts faits des souverains. De la poésie quechua, a été conservé le fameux drame Ollantay, d'origine certainement préhispanique, mais qui fut probablement recopié et amendé à l'époque de la Colonie. Dans la veine sentimentale et mélancolique, un genre, le yaravi, subsite toujours aujourd'hui dans les Andes, de même que le huayno, d'inspiration plus joyeuse. L'un est l'autre sont toujours accompagnés de musique et de danses.


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©Daniel DUGUAY / dduguay@club-internet.fr


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