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Guide du Pérou |
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120 000 hab. -- alt. 402 m -- Lima : 303 km -- Nazca : 144 km -- Pisco : 77 km
Vignoble dans la région d'Ica (photo D. Duguay)
Préfecture du département du même nom, Ica est depuis l'époque coloniale la capitale vini-viticole du Pérou. Les Espagnols y implantèrent des cépages originaires des Canaries et y cultivèrent la vigne. La production était embarquée dans le port de Pisco, qui donna son nom à la fameuse eau de vie. Les vins rouges ne sont pas en reste, avec les célèbres domaines de Tacama et d'Ocucaje. Ville agréable, Ica est surnommée "la ville de l'éternel printemps". Comptant peu de monuments notables, elle mérite un arrêt pour son Festival de la Vendimia (Festival des vendanges), qui a lieu dans la deuxième semaine de mars.
A voir :
Musée Régional d'Ica
Situé à la sortie de la ville, c'est l'un des plus intéressants de la Côte centrale du Pérou. On peut y admirer une collection de textiles et de céramiques de la période Nazca, ainsi que de nombreuses momies de Nazca et de Paracas dont certaines présentent des traces d'opération chirurgicales et de trépanations. Sur d'autres encore, on peut apprécier des exemples de déformations crâniennes qui étaient l'apanage des personnages de l'aristocratie, depuis l'enfance. A l'extérieur a été reproduite une maquette des lignes de Nazca que l'on peut observer dans toute son étendue depuis un mirador.
Crânes déformés du Musée régional d'Ica
Sanctuaire du Señor de Luren
Sur une agréable place entourée d'arcades, l'église (construite au 19e s.) renferme un Christ en croix du 16e s., venu d'Espagne, qui passe pour opérer des miracles. Très vénéré dans toute la région, il est sorti en procession pour les Jeudi et Vendredi saints, ainsi que le 3e dimanche d'octobre. Le sanctuaire est en cours de restauration : il a malheureusement été très endommagé lors du séisme de 2007.
Museo Cabrera
Jr Bolivar 170 (Plaza de Armas). Visite sur rendez-vous
Sur des étagères poussiéreuses s'alignent près de 30 000 "pierres gravées d'Ica" amassées par l'excentrique docteur Javier Cabrera Darquea, décédé en 1977. Le docteur Cabrera dédia quarante ans de sa vie à soutenir la thèse selon laquelle ces pierres gravées, trouvées dans le désert d'Ocucaje, avaient une antiquité de 100 000 ans et qu'elles représentaient, pour la plupart, des scènes de la civilisation de "l'homme du Glyptolithique", une race d'extraterrestres envoyés sur la Terre par les dieux. Sur de gros galets d'andésite noire gravés par incision, on découvre des hommes (dont les coiffures évoquent celles des anciens Mayas ou Aztèques) attaquant à coups de hache de grands monstres stylisés qui ressemblent à des dinosaures. Une série de pierres montre cet "homme du Glyptolithique" effectuant une opération à coeur ouvert, pratiquant une césarienne à un dinosaure (qui en principe est ovipare), sur d'autres, il est juché sur un astronef. Mais il y a aussi des pierres sur d'autres sujets : représentations de créatures marines préhistoriques, combats d'animaux préhistoriques entre eux, ainsi qu'une très curieuse "mappemonde" représentant des continents disparus, etc.
Deux "pierres gravées d'Ica" du musée Cabrera, dont une mappemonde préhistorique (à g.)
Ces pierres gravées devinrent célèbres auprès des amateurs de mystère lorsque le docteur ouvrit son musée en 1966 et qu'il publia son livre Le message des pierres gravées d'Ica (1976). Il prétendait qu'un paysan de la région les avait découvertes dans une caverne (qui n'a jamais été retrouvée). Or, ce paysan, que la police avait arrêté parce qu'il vendait le même genre de pierres aux touristes, raconta plus tard aux autorités qu'il ne les avait pas trouvées dans une caverne, mais qu'il les gravait lui-même chez lui. Bien entendu, les archéologues ne prirent jamais cette histoire au sérieux, sauf les auteurs de livres à succès consacrés aux énigmes de l'univers qui en firent leurs choux gras dans les années 1970, tels que Charles Berlitz ou Robert Charroux. En 1998, malheureusement, un chercheur espagnol produisit des micrographies de certaines pierres qui révèlent l'emploi de peintures actuelles ainsi que des traces de papier abrasif... Il n'en reste pas moins que les thèses du docteur Cabrera rencontrent encore de nombreux défenseurs et que l'originalité de son musée attire toujours des visiteurs du monde entier.
Laguna de Huacachina
5 km en taxi ou en minibus
Nichée au creux d'un décor de dunes, comme un oasis miraculeux, ce petit lac est entouré d'une surprenante végétation tropicale de palmiers, de tamaris et d'eucaliptus. Au bord de la promenade quien fait le tour, se sont construites de jolies maisons de campagne ainsi qu'un établissement thermal où l'on soigne rhumatismes et maladies de la peau. Des restaurants y sont ouverts les samedi-dimanche où règne alors une animation touristique assez mercantile et surtout très bruyante. Mieux vaut venir s'y promener en semaine.
Cachiche, village des sorcières
A 5 km du centre-ville, ce curieux village est connu comme l'ancien repaire des sorcières et des guérisseurs de la région d'Ica. Le décor s'y marie à la perfection avec la légende : dans une chaleur étouffante, Cachiche est situé au milieu d'un bois où les arbres ont des formes aussi extravagantes que mystérieuses : le clou en est un palmier nain dit "à neuf têtes" : certaines de ses branches s'enfouissent dans le sol, pour en ressortir. L'imagination populaire a en outre décoré la clairière de statues de sorcières et de pierres gravées, conférant à l'endroit un aspect quasiment "hallowynesque" très curieux dans ce coin terreux et perdu du Pérou.
Le charme de l'hacienda Vista Alegre (photo D. Duguay)
Les haciendas vinicoles autour d'Ica
Hacienda Vista Alegre
3 km au nord d'Ica par la Panaméricaine Sud dans le quartier de La Tinguina
Après avoir franchi un imposant portail de pierre, on accède aux vignes et aux chais de ce domaine qui produit des vins et du pisco depuis sa fondation en 1857 par la famille Picasso, qui après cinq générations, en est toujours propriétaire. On y verra d'impressionnants alignements d'alambics en cuivre et de foudres en bois de chêne dont certains furent fabriqués en Tchécoslovaquie dans les années 30. Son pisco est commercialisé sous la marque Sol de Ica. Les plus anciens bâtiments abritaient auparavant un monastère jésuite. A visiter de préférence dans la matinée, avant l'arrivée des groupes organisés.
Bodega El Catador
7 km au nord d'Ica par la Panaméricaine Sud
Très visitée, cette cave est surtout réputée pour son pisco et sa cachina, un vin doux et aromatisé que l'on prend en digestif. On y trouvera un petit musée, une salle de dégustation, et une taverne où l'on peut déjeuner.
Hacienda Tacama
10 km au nord d'Ica par la Panaméricaine Sud
L'origine de cette hacienda viticole, la plus ancienne du Pérou, remonte au 16e s., époque de la demeure principale et des écuries. Depuis la fin du 19e s., la propriété est exploitée sous le nom de Tacama par la famille Olaecheas, qui s'est attaché dès 1924 les conseils d'oenologues français renommés. Ses vins et son pisco sont ainsi vendus chez Fauchon à Paris. Le pisco provient d'un seul cépage, le quebranta, mais la maison fait aussi des assemblages (acholado). Les 200 ha de vignes, irrigués en partie par un ancien aqueduc préhispanique, l'achirana del Inca, que sont venus compléter des travaux hydrauliques modernes, consistant à prélever dans les Andes des eaux destinées au versant amazonien. Le domaine de Tacama produit de bons vins blancs et deux vins rouges réputés, le Gran Tinto et le Don Pedro, qui font jeu égal avec les meilleurs vins chiliens et argentins.
Hacienda Ocucaje
35 km par la Panaméricaine Sud (km 134) en direction de Nazca
Cet autre grand nom des vins d'Ica occupe un domaine colonial fondé au 16e s., qui produit des vins blancs et rouges estimés, ainsi que du pisco, parmi les meilleurs du pays. à côté des installations vinicoles modernes, l'ancienne maison de maître et ses dépendances ont été transformées en un hôtel haut de gamme avec piscine, billard, restaurant et vinothèque.
Le pisco, orgueil national
L'origine péruvienne du pisco est mentionnée dès 1588 par les chroniqueurs espagnols : les grandes jarres en argile contenant une eau-de-vie de raisin étaient embarquées vers l'Espagne par le port de Pisco, d'où son nom. Depuis la fin des années 1980, le Pérou se bat avec le Chili qui tente de s'attribuer la paternité de la précieuse liqueur, à tel point qu'en 1988, le gouvernement d'Alan García, qui exigeait pour son pays l'appellation contrôlée, proclama le pisco « patrimoine culturel de la nation » et interdit l'importation de l' « imitation chilienne ». Le Chili répliqua en bannissant les bouteilles péruviennes et une « Journée nationale du pisco » fut décrétée par le Pérou en 2002 en vue de soutenir sa légitime revendication. Les principales zones de production sont les régions d'Ica et de Moquegua ainsi que le sud du département de Lima. Le pisco peut être puro (issu d'un seul cépage, le plus commun étant le Quebranta), acholado (littéralement « métissé », c'est-à-dire issu de plusieurs cépages), mosto verde (distillé avant la fermentation complète) ou bien de tipo Italia (élaboré avec du muscat). Si les connaisseurs le boivent pur, en digestif, le pisco intervient surtout dans la préparation du pisco sour, cocktail où on lui ajoute du jus de citron vert, du blanc d'oeuf battu en neige et de la glace pilée. Le cocktail de algarrobina, également délicieux mais plus sucré, est élaboré avec du pisco, du lait condensé et un épais sirop brun foncé, l'algarrobina, qui n'est autre que le fruit du caroubier.
Plus simples, le chilcano de pisco consiste à ajouter du tonic, tandis que le Perú libre est un mélange de pisco et de Coca Cola.
©Daniel DUGUAY
dduguay@club-internet.fr