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Guide du Pérou |
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240 km A-R - alt. maxi : 4240 m - 1 bonne journée (déjeuner à Vilcashuaman).
Les petites agences de tourisme d'Ayacucho proposent cet itinéraire en minibus ou en combi pour une somme modique. Sur tout le parcours, la route - parfois très dégradée - est en terre et en pierre, présentant de fortes déclivités et des courbes très reserrées, tutoyant d'insondables prépicipices.
La sortie d'Ayacucho se fait par la route de Cuzco et entame une vertigineuse montée en lacets à flanc de montagne. En s'élevant, on découvre des vues prodigieuses sur les canyons des rios Occopa et Huatatas, sorte de chaos géographique entrecoupé de failles et de gorges profondes, tandis que l'horizon, au Nord, est entièrement barré par la masse colossale de la Cordillière Centrale. Après une heure de route, on parvient à une succession de petits plateaux agricoles, peuplé de rares cabanes : c'est la pampa de Chupas, là même où, le 15 Septembre 1542, se livra la bataille de Chupas entre les forces du vice-roi Vaca de Castro et les troupes de Almagro El Mozo, fils de Diego de Almagro (l'ancien associé de Francisco Pizarro). Le parti des "Almagristes", qui voulait s'affranchir de la tutelle royale espagnole et s'emparer des richesses du Pérou pour son propre compte, fut battu et ses chefs exécutés. Quelques centaines de survivants de l'armée d'Almagro parvinrent à s'enfuir vers le Sud.
La montée se poursuit encore jusqu'à l'Abra de Toccto (4240 m) où la route vers Cuzco bifurque vers l'Est. En longeant de nouveaux précipices, on parvient, à 60 km d'Ayacucho, au petit lac de Condorcocha où bifurque à dr. la route de Cangallo.
Les "Morochucos"
C'est vers les vastes et lointaines pampas de Cangallo que quelques centaines de fuyards de l'armée d'Almagro El Mozo, battus à Chupas, allèrent trouver refuge en 1542. Redoutant la vengeance des forces royales, ils y demeurèrent et fondèrent le village de Cangallo (100 km au Sud d'Ayacucho) au bord du Rio Pampas où ils firent souche : ils sont à l'origine des fameux "Morochucos" à la peau claire, aux yeux bleus et aux grandes barbes, type que l'on rencontre encore dans la région de Cangallo. Plus guerriers qu'agriculteurs, ils laissèrent aux indiens le soin de cultiver la terre pour se consacrer à l'élevage, et formèrent une caste de guardians ou de gauchos un peu bohèmes, toujours revêtus d'un grand poncho, inséparables de leurs chevaux, grands buveurs d'aguardiente et habiles à trousser des ballades sur leurs guitares.
Peu avant d'arriver à Vischongo, une mauvaise piste mène à dr. vers la laguna de Pomacocha, plan d'eau artificiel sans doute aménagé au temps des Incas. Adossé à une colline et face au lac se dressait un centre cérémoniel dont on peut encore voir d'intéressants vestiges, le mieux conservé étant l'Intihuatana (observatoire solaire) élevé sur un "torreon", grosse construction semi-circulaire dont les murailles, en appareillage typiquement inca, épousent les courbes de niveaux du terrain. En contrebas, une belle fontaine inca à double jet d'eau semble la réplique du Tambomachay proche de Cuzco. Plus loin, se dressent les vestiges d'un "acclahuasi" et du palais de l'Inca. L'ensemble est isolé du lac par un remarquable mur de contention servant de terrasse ou de parapet, qui ne mesure pas moins de 1500 m de long.
A peu de distance, face à la place principale, l'église coloniale est assise sur les vestiges du Temple du Soleil, en trois terrasses superposées (les fondations de l'église étant encastrées dans la troisième terrasse). La seconde est ornée de nombreuses niches trapézoïdales, un grand escalier dessert les gradins et aboutit devant le portail de l'église. Cet ensemble étonnant et très pittoresque fait assez penser au village de Chinchero, près de Cuzco. Sur la place, on verra également un trône de pierre et un monolithé évidé, baptisé "pierre des Sacrifices".
En remontant la rue derrière l'église, on parvient à un petit enclos où a été mise à jour la Piedra del Vaticino (Pierre des augures), sorte d'autel incliné et creusé de petits canaux en zigzag, se rejoignant en un seul au bord de la pierre. Les sillons devaient recueillir le sang d'un lama sacrifié et, suivant sa trajectoire, les prêtres prédisaient les bonnes ou les mauvaises années, les mariages heureux ou malheureux, etc.
©Daniel DUGUAY
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