Guide du Pérou

Pucallpa et le rio Ucayali

Le département d'Ucayali, séparé de celui du Loreto en 1980, se situe dans la Selva Central, gigantesque étendue verte qui occupe toute la partie Est du Pérou, frontalière avec le Brésil. Pour une superficie de 102 410 Km2, ce département est une immensité dépeuplée, sa population ayant été recensée à 456 000 habitants.
Le Rio Ucayali, qui lui donne son nom, fut découvert par le capitaine Juan de Salinas Loyola en 1557. C'est un géant de 1600 km de long qui en rejoignant le Rio Marañon, en amont d'Iquitos, forme l'Amazone et dont on sait aujourd'hui que son cours supérieur (le Rio Apurimac) en constitue la source.
Au temps des Incas et après la conquête espagnole, le bassin du Rio Ucayali et de ses affluents était occupé par la tribu amazonienne des Pano dont il en subsite aujourd'hui encore plusieurs groupes, descendants directs de la famille linguistique Pano : Shipibos (leur artisanat est réputé), Cashibos, Conibos, et Pisquibos.
Le climat, comme ailleurs dans la Selva, y est très chaud et humide. La saison estivale s'étend d'Avril à Novembre, avec une température moyenne de 26°. La saison dite "hivernale", de Décembre à Mars voit les températures baisser à peine : les pluies y sont fréquentes, et parfois torrentielles.


Le Rio Ucayali (photo America Economia)

De Huánuco à Pucallpa
Voir la page Huánuco et les sites oubliés du Haut-Marañon

A la sortie nord-est de Huánuco, la route longe un moment le cours supérieur du Rio Huallaga, puis s'en écarte pour franchir la Cordillera Oriental par le tunnel de l'Abra Carpish (2750 m). On entre alors dans la "Ceja de Montaña", nom local donné à la Selva Alta et l'on retrouve le Rio Huallaga en approchant de Tingo Maria.

Parc National Tingo Maria
6 km au sud de Tingo Maria
Ce parc naturel de 18 000 ha qui s'étend au confluent du Rio Monzon et du Rio Huallaga offre pour principale curiosité la fameuse Cueva de las Lechuzas (Caverne des Chouettes). Comme pour la grotte de Guagapo près de Tarma, on ignore sa profondeur exacte (elle n'a été explorée que sur une profondeur de 400 m) et en dépit de son nom, ce ne sont pas des chouettes qui peuplent ses parois obscures mais une colonie de guarachos des cavernes (Steatornis caripensis), une très ancienne espèce d' oiseau nocturne, considéré comme un véritable fossile vivant. C'est à la tombée du soir qu'on pourra les voir sortir mais il vaut mieux la visiter le matin lorsque le soleil éclaire l'intérieur de la grotte avec ses imposants stalactites et stalagmites. On s'apercevra alors que d'autres espèces avicoles habitent la grotte, près de l'entrée : des chauve-souris, des perroquets et des picaflors.


Près de Tingo Maria : le Rio Huallaga et la Bella Durmiente

Tingo Maria
120 km de Huanuco - 283 km de Pucallpa - 55 000 hab.
Ville-carrefour animée et au climat agréable, Tingo Maria est surnommé la Bella Durmiente (La belle au Bois-Dormant) car vue depuis la ville, la chaîne de montagnes qui la domine au sud épouse la forme parfaite d'une femme allongée. Elle était dans les années 1980 considérée comme petite une capitale régionale des narco-trafiquants et avait la réputation d'être une ville dangereuse et mal famée. Ce n'est heureusement plus la cas aujourd'hui. Bien munie en hôtels, restaurants, bars et discothèques, elle peut servir d'étape - déjà très exotique - sur la route de Pucallpa.

A 15 km au nord de Tingo Maria, on laisse à g. la Carretera Marginal de la Selva qui suit la vallée du Rio Huallaga dans son cours moyen, vers Tocache et Janjui. Cette région du Huallaga central fut dans les années 1980-1990 l'un des repaires de la guérilla du Sentier Lumineux, tout en étant aussi - mais depuis plus longtemps - l'une des principales régions de culture de la coca. Après la capture d'Abimael Guzman en 1993, les derniers groupes sendéristes tentèrent de s'y maintenir en s'alliant avec les narcotrafiquants, d'où le nom de "narco-terrorisme" donné à ce dernier épisode du Sentier Lumineux.

La route se remet à monter et 25 km après ce carrefour, on franchit la Cordillera Azul à l'Abra Divisora (1613 m) pour entrer dans le département d'Ucayali. Après ce col, la route entame une descente assez vertigineuse, qui peut s'avérer dangereuse à la saison des pluies, jusqu'au Boquerón del Padre Abad.

Boquerón del Padre Abad
A mi-distance entre Huanuco et Pucallpa, cet extraordinaire défilé où le Rio Yuracyacu et la route de Pucallpa se fraient un étroit passage débouchant sur l'immense plaine amazonienne, fut découvert en 1757 par un intrépide missionnaire franciscain, le père Francisco Alonso de Abad, qui parvint jusque là, guidé par des indiens natifs de la région. Il nota l'emplacement de ce passage dans ses écrits, qui furent plus tard enfouis sous la poussière d'une bibliothèque de couvent et l'on entendit plus parler du boquerón pendant près de deux siècles.
A près de 450 m d'alt. et sur environ 4 km de long, le défilé est cerné par des falaises escarpées et tapissées d'une végétation exubérante d'épiphytes, atteignant parfois 1500 m de hauteur, d'où jaillissent près de 70 chutes d'eau provenant des sommets de la Cordillera Azul. Les plus spectaculaires de ces chutes ont été baptisées El Velo de la Novia (Le Voile de la Mariée) et La Ducha del Diablo (La Douche du Diable).


Le Boquerón del Padre Abad, vue aérienne


La route Francisco Basadre
Dans les années 1930, sous la présidence du général Benavides, alors que Pucallpa demeurait isolée du reste du Pérou et seulement accessible par voie fluviale depuis la lointaine Iquitos, on cherchait par où tracer la route la plus directe qui y conduirait depuis Lima. On avait étudié plusieurs tracés, l'un prenant beaucoup plus au nord, l'autre plus au sud, les deux solutions impliquant de franchir des cols à des altitudes considérables. Ayant eu connaissance de ces projets, un missionaire franciscain espagnol, le frère José Agurrezábal, fit publier dans des journaux locaux des articles où il faisait état de la découverte d'un passage situé sur une route plus directe et à une altitude bien moindre, par un religieux de son ordre au milieu du 18e s., le Père Francisco Alonso de Abad. Comme personne ne l'écoutait, il se rendit à Lima et demanda à voir le président Benavides en personne. Ce dernier le reçut, écouta les arguments de son visiteur et parut convaincu. Il demanda à son ministre des transports, l'ingénieur Francisco Basadre, de mener une étude sur la base des documents fournis par le religieux, qui n'étaient autres que la relation écrite par le Père Francisco de Abad en 1757.
Une expédition de reconnaissance, diligentée par le ministre, finit par redécouvrir l'existence du passage le 23 juillet 1937, après 20 jours de recherches : le tracé de la route Lima-Pucallpa était arrêté. Le tronçon Tingo Maria-Pucallapa fut inauguré douze ans plus tard, en 1943 : la nouvelle route reçut le nom du ministre qui avait fait démarrer les travaux, Francisco Basadre, et l'on donna au défilé, qui n'avait pas de nom, celui de son lointain découvreur, le Père Abad.


Après avoir franchi le défilé, on rencontre Aguaytía, première petite capitale de province amazonienne, chaudement installée sur la rive gauche du Rio Aguaytía, avec sa place, son église, ses maisons précaires aux toits de tôle et son petit port fluvial.
A la sortie du bourg, on franchit un pont suspendu jeté sur la rivière, long de 800 m, qui serait le plus long pont routier du Pérou. Au-delà, la route tracée en ligne droite jusqu'à Pucallpa, traverse la grande étendue selvatique de la Pampa del Sacramento, là-même où les Franciscains, au 18e s., tentèrent sans grand succès, de s'établir auprès des Indiens Cashibos et Conibos.


Aguaytía et son pont suspendu - Port fluvial de Pucallpa, sur le rio Ucayali (photo Documental Perú).

Pucallpa
200 000 hab. - alt. 154 m - Huánuco : 375 km - Lima : 842 km (vols quotidiens Lima-Pucallpa, durée 1 H). Trajet en bus : compter 24 H (via Huánuco et Tingo Maria) - 5 à 7 jours d'Iquitos (par voie fluviale)
Située sur la rive gauche du Rio Ucayali, la capitale du département est reliée au reste du pays par la route, mais il faut s'armer de patience depuis Lima pour en venir à bout. Cette aventure est d'ailleurs très aléatoire à la saison des pluies. Par contre, des vols quotidiens relient Lima à Pucallpa.
La ville ne fut fondée que tardivement, en 1888 et ne se développa qu'à partir des années 30. Son essor fut rapide : 21 000 hab. en 1961, 60 000 en 1972, 179 000 en 1993, plus de 200 000 aujourd'hui. Point de rupture de charge entre la circulation routière et fluviale, Pucallpa est devenue le port fluvial le plus important de la Selva Central, notamment pour le commerce du bois : elle exporte près de la moitié des bois tropicaux du Pérou et compte de nombreuses scieries. A cela s'ajoute les ressources du pétrole, découvert dans les années 60. Une grande raffinerie y a été implantée.
Ville fort animée, Pucallpa se présente comme un grand bidonville tropical et coloré, Les hôtels et restaurants de toutes catégories y sont nombreux. On n'aura aucune peine à se loger. Pucallpa n’offre pas de monuments remarquables : son intérêt est ailleurs, dans le dépaysement qu’offre les bruits et les couleurs d’une grande ville tropicale poussée à la va-vite. La plaza de Armas et ses alentours connaissent une activité commerciale trépidante. À quatre cuadras, sur la plaza del Reloj público, se dresse une tour haute de 25 m, couronnée d’une grande horloge. La tour servait autrefois de phare aux vapeurs approchant la nuit de Pucallpa.
De la place, part le malecón tracé au bord du rio Huallaga, d’où l’on peut observer le fleuve, dé préférence à la tombée du soir, animé par l’incessant ballet des embarcations chargées de troncs d’arbres ou de régimes de banane…
Toujours en plein centre, le Mercado Modelo n° 4 mérite la visite pour ses étalages colorés, croulants sous des amoncellements de légumes et de fruits tropicaux, ses stands odorants d’herboristerie et de médecine naturelle, ses kiosques à jus de fruit et ses innombrables petites gargotes.
Le meilleur moment pour se rendre à Pucallpa est au mois d’octobre (du 12 au 19) pour la Semaine Touristique de l’Ucayali : nombreux spectacles de musique et de danse, expositions de peinture et de sculpture, féria artisanale où les indiens Shipibos viennent vendre leurs céramiques, tissus, parures de plumes, etc.

A voir aux environs

Parque Natural de Pucallpa - 4 km
Ce grand parc paysager qui occupe une superficie de 170 ha a été créé pour protéger diverses espèces menacées, tels que singes, lézards, grues, toucans, perroquets, etc. Le parc est jalonné de sentiers-découverte où l'on peut apprécier les effets d'un patient travail de reboisement et de reflorestation, ainsi qu'un petit lac servant de réserve de poissons amazoniens.
Le parc abrite le
Museo Regional de Ucayali qui conserve quelques espèces représentatives de la flore locale et une grande collection de fossiles découverts dans les ríos Ucayali, Pachitea, Aguaytía et Urubamba. On y voit notamment une mâchoire de grand lézard vieille de 10 millions d'années.
Le musée renferme également une salle présentant des objets la culture Shipibo-Conibo (instruments, vêtements traditionnels, céramique) à des époques diverses.

Laguna de Yarinacocha
7 km au nord-ouest

A 15 mn en autobus, on parvient à cet immense plan d'eau, entouré d'une dense végétation tropicale, qui a été transformé en centre récréatif. On peut y faire des promenades en canot à moteur, pratiquer la pêche ou le ski nautique. Sur les bords du lac, ne pas manquer de visiter le magnifique jardin botanique réalisé par l'Institut Linguistique de l'Université d'Oklahoma. Pendant la saison des pluies, le lac se retrouve connecté au Rio Ucayali par un réseau de petits canaux.

De Pucallpa à Iquitos par le Rio Ucayali
C'est une belle aventure à vivre.
Des ferries relient Pucallpa à Iquitos trois fois par semaine en 3 à 5 j. Renseignements sur les départs à la Capitania del Puerto, av. Mariscal Castilla 805. Les tarifs vont de 35 à 145 $ suivant la classe (en suspendant votre hamac sur le pont ou en cabines de 2 ou 4 couchettes avec toilettes et sdb privatives). La qualité des repas est également différente. Attention : le port de Pucallpa a la particularité de changer d’emplacement en fonction du niveau du Rio Ucayali. Pendant la période des crues (janvier-avril), les bateaux accostent en face du centre-ville, au bout du Parque San Martin. Lorsque le niveau est plus bas, ils accostent à Puerto Henry (1 km au nord, au bout de l’av. Manco Capac).
Les bateaux font escale à Contamaná et Requena, deux bourgades absolument perdues au bord de l’Ucayali. Dans le sens inverse, en remontant le fleuve depuis Iquitos, il faut compter deux jours de plus pour le même trajet.
En amont de Pucallpa, des bateaux plus petits remontent le Rio Ucayali jusqu’à Atalaya, petite bourgade complètement isolée au confluent du Rio Tambo (autre nom de l’Apurimac) et du Rio Urubamba. Pas de service régulier : se renseigner au port.


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